Cette année 2025, la Renault Clio fête ses 35 ans. Pour célébrer ce passage et anticiper la présentation, le 8 septembre, de la Clio VI, la rédaction du Nouvel Automobiliste a décidé de revenir sur les cinq générations de la citadine dans leurs époques, sur l’histoire d’une muse automobile au style en mouvement, et sur la culture publicitaire ainsi que son destin commercial. Troisième épisode maintenant avec l’histoire de la Clio III, la Renault Clio devenue le modèle de référence du segment des citadines.

Une Renault Clio qui doit être parfaite
Un peu de contexte pour commencer la rétrospective de la Clio III. A son arrivée au milieu des années 2000, Renault est à l’aube de profondes transformations. Le constructeur traverse une grave crise de confiance de ses clients vis-à-vis de la fiabilité de ses modèles, suite à des casses moteur et des problèmes électroniques. Une période regrettable, d’autant que Renault devenait au même moment le premier constructeur à avoir l’ensemble de sa gamme 5 étoiles au crash test. A l’inverse, sur les marchés émergents, le Groupe développe via sa marque low-cost Dacia les premiers véhicules bon marché modernes, suivant une démarche toujours pas égalée aujourd’hui.
A la rencontre de ces tendances, le projet X85. La Renault Clio doit être à la hauteur des attentes, qui sont une montée en gamme de Renault, une sécurité maximale, et une fiabilité sans faille. Pour le design en revanche, les courants du début des années 2000, ceux du « Créateur d’automobiles » inspiré de l’architecture anguleuse, ne sont pas totalement repris. La Renault Clio III sera une petite Mégane, mais pas une Mégane en réduction. Ou plutôt, elle faillit l’être… car les premiers sketchs, en 2002, montrent une forte inspiration avec la compacte du Losange.



Longue de 3,99 m, la Renault Clio grossit de près de 20 cm par rapport à la Clio II afin d’augmenter son espace à vivre, son volume de coffre, et créer une zone de déformation frontale pour les crash-tests. L’époque est à l’allongement aussi chez les concurrents.
Après la période de « l’angle-roi » (Mégane II, Espace IV), les stylistes de Renault retrouvent le chemin des rondeurs avec la Modus (2004). La Renault Clio se trouve à mi-chemin entre ces deux tendances, avec certes des lignes tendues mais des optiques malgré tout arrondies. L’ensemble n’est pas révolutionnaire mais est homogène et bien dans son époque. Elle saura inspirer, en partie, les lignes de la Toyota Yaris III, lancée en 2011… Les phares conservent des moustaches amoindries autour du Losange, tandis qu’un bouclier spécifique est créé pour la Clio R.S.
A bord, l’intérieur est dans la tendance des habitacles des récentes Mégane et Scénic : des aérateurs centraux joints, des ambiances beige en niveaux 3 et 4 – Privilège et Initiale, et une belle qualité avec des plastiques, moussés à cœur. Longtemps, la Clio est leader de la qualité perçue dans le segment, devant la VW Polo, contrairement à la Clio IV !
La Renault Clio III est, enfin, la Clio des « scoops », ceux d’Auto Plus qui au milieu des années 2000 traque prototypes et pré-séries en tests. Certes la pratique est courante depuis les années 80 mais les Clio I et II étaient passées entre les mailles du filet… Pas la III !… qui nous parle d’un temps où les prototypes étaient très peu camouflés !

La Renault Clio 3, surprise par les chasseurs de scoop d’Auto Plus quelques mois avant sa présentation (source : Auto titre).
Encore Voiture de l’Année !
Le présentation de la Renault Clio III par la Présidence du Groupe a lieu en juin 2005. C’est un moment intéressant, car depuis le 29 avril, le Groupe Renault a changé de P-DG : Carlos Ghosn succède à Louis Schweitzer. Le « Cost killer », auréolé du redressement réussi de Nissan, revient dans la maison-mère où il avait déjà appliqué ses méthodes entre 1997 et 1998 avec pour ambition de rationaliser les coûts. C’est ainsi que, lors du lancement de la Clio IV, Renault précisera bien vouloir lancer une Clio « rentable », ce qui après coût signifie que la « III » ne l’était pas. Pour l’heure, en 2005, M. Ghosn pose fièrement à côté de sa première Renault.
Le lancement de la Renault Clio III s’effectue en grandes pompes en terres allemandes, au Salon de Francfort en septembre 2005. Elle a été présentée présentée officiellement au salon de Genève notamment avec le concept R.S. puis à la presse en juin de la même année. Entièrement nouvelle, cette Clio vient non seulement concurrencer la Peugeot 206 mais également préparer le modèle à affronter une nouvelle génération de concurrentes, emmenées par la Peugeot 207, la Citroën C3 et les indéboulonnables Opel Corsa, Volkswagen Polo et Fiat Grande Punto. Plus qu’un simple renouvellement, Renault veut avec cette Clio III être la référence incontestable du segment.

Au cours de sa genèse, Renault a effectivement souhaité avoir un véhicule confortable, élégant et pratique tout en conservant des prix raisonnables. Le tout donne une voiture assez élégante, plus grande que sa devancière, très polyvalente et dont la finition va longtemps être une référence. Vraie « Voiture à vivre », selon se slogan cher à la marque au Losange, elle est saluée par la presse en obtenant le titre de « Voiture de l’Année 2005 ». C’est la première voiture à obtenir deux fois ce titre, puisque la Clio I se l’était vu décerner en 1990.
Un design homogène
La Renault Clio II, malgré un design consensuel voire fade, eut la carrière couronnée de succès. Pour la Clio III, l’ensemble est plus homogène, mais toujours pas révolutionnaire. Le design de cette Clio III est très intéressant à analyser dans le sens où elle a imposé la tendance de l’époque, celle des citadines qui n’en sont presque plus avec leurs 4,00 m de long. Toutes les concurrentes suivent cette valeur étalon : Peugeot 207, Opel Corsa, Fiat Grande Punto, entre autres.
Elle arbore une certaine élégance – et une élégance certaine – sous une prudence bienvenue, au ressenti plutôt féminin, notamment à l’avant avec la forme des projecteurs qui rappellent des yeux sur certaines versions haut-de-gamme au xénon. La double moustache qui englobe le logo agrandi reprend le code stylistique vu pour la première fois sur le concept Initiale en 1995 et sur la Vel Satis en 2001, dans un style affiné.





Le nez plongeant montre une volonté d’affirmation et de domination de la route. La route, ce sujet tabou dans le segment des citadines, devient un autre terrain de jeu en plus de la ville pour la Renault Clio. Bonne autoroutière intrinsèquement, la voiture traduit cette aptitude par un style tournant autour de la sécurité : on a voulu rassurer le conducteur sur tous ses trajets, courts comme longs. D’où la prise de centimètres conséquente entre elle et son ainée de 1998 (+ 18 cm de long, +8 cm de large et +7 cm de haut).
De profil, on distingue une masse générale rondouillarde et portée vers l’avant. La ceinture de caisse inclinée et l’épaulement de plus en plus large traduisent de façon plus explicite ce sentiment de sécurité. Si les surfaces vitrées latérales ont grandi, on ressent déjà les prémices du code « 2/3 1/3 » : 2/3 de carrosserie pour 1/3 de surface vitrée. A l’arrière, la lunette plus petite et plus verticale que sur la précédente mouture, tandis que les pare-chocs et le coffre se veulent plus robustes tout en étant fondus dans la carrosserie.











Bien sûr, la Clio Renault Sport, ou Clio R.S. pour les intimes, est de nouveau de service. Elle est vue pour la première fois en 2006 au salon de Genève (un show car avait été présenté à Francfort, en septembre 2005). Elle se distingue par un kit carrosserie suggestif doté de pare-chocs avant et arrière revus, d’élargisseurs d’ailes, de jantes de 18 pouces, d’une entrée d’air au-dessus de l’aile avant, d’un becquet, d’extracteur d’air englobant deux sorties d’échappement. Sous le capot, on trouve un 2.0 atmosphérique de 200 chevaux fort apprécié pour son exigence dans les tours. La Renault Clio R.S. est commercialisée dès l’année suivante, trop tard cependant pour coller avec les succès du Losange en Formule 1…









En rouge (trois premières images) : la Renault Clio RS showcar, présentée au salon de Francfort de septembre 2005. Il faudra attendre mars 2006 et le salon de Genève pour découvrir la version de série, ici en gris.
Pour la première fois, une Clio break
La grande nouveauté, en revanche, c’est le break Clio Estate, Sport Tourer, Grand Tour ou Grand Clio selon les marchés. Produit à Bursa en Turquie, il rejoint la gamme en 2008. Si la face avant ne change pas, le profil devient soudainement plus lourd, avec un porte-à-faux arrière très long. Le dessin du hayon, très arrondi, finit par provoquer le fameux effet « sac à dos » des breaks. Néanmoins, cette rondeur exacerbée offre un sentiment de robustesse à l’arrière du modèle, comme s’il était prêt à partir, chargé comme un mulet.



D’abord, la Renault Clio Grandtour concept (Genève 2007).
Cela bénéficie à l’espace de chargement, supérieur à celui de sa rivale, la Peugeot 207 SW. On note aussi la présence d’un seuil de chargement plus bas et d’une modularité intérieure assez élaborée pour rabattre tous les sièges et offrir jusqu’à plus de 2000 dm3 de chargement. La lunette arrière agrandie et les renforts du pare-chocs arrière rassurent au même titre que sur la version classique.





Ensuite, la Renault Clio III Estate de série, dévoilée en septembre 2007 au salon de Francfort.
En 2009 arrive le restylage. La Clio reprend les inspirations des Renault du moment, la Twingo II et la Laguna III, avec une absence de calandre. Cela lisse sa présence dans la gamme et la rend plus élégante. La couleur unie, la grande bouche du pare-chocs avant, laissant déborder 2 dents sur les projecteurs, mais aussi le nouveau dessin des feux arrières contribueront à une sorte de montée en gamme visuelle du modèle. Une version GT avec élargisseurs de bas de caisse, peu subtils, arrive. Petit clin d’œil à la Renault Clio II de 1998, la fine calandre en forme de stick a été reprise sous le logo Renault.
La Renault Clio R.S. reçoit un restylage conséquent qui prête à discussion : si la phase 1 est harmonieuse, la phase 2 adopte une grosse bouche grise ou noire qui sort du pare-chocs avant. Cette lame F1 dans la partie inférieure du pare-chocs, qui n’apporte pourtant rien en termes d’harmonie stylistique, a pour autant été léguée à la Mégane R.S., la Twingo .R.S ainsi qu’à la Clio IV R.S…. Pour sa fin de carrière, la Clio III devint Clio Collection, sans modification esthétique par rapport à la phase 2 de 2009.












La Renault Clio III Phase 2 (2009). Notamment visible en RS, en Vert Alien.
Les gammes au fil des ans
Au début de sa carrière, 6 finitions sont au programme : Pack, Confort, Confort Pack Clim, Luxe Dynamique, Luxe Privilège, Initiale. Un remaniement est fait dès l’année suivante (2006) : on passe à Authentique, Expression, Rip Curl Dynamique, Privilège, Exception, Initiale. Côté moteurs, on note 10 blocs, à raison de 7 essence et 3 diesels : 1.2 16v (75 ch), 1.4 16v (98 ch), 1.2 16v turbocompressé TCe 100 ch , 1.6 16v (110 ch, disponible en boîte automatique), 2.0 16v (140 ch, disponible en boîte automatique jusqu’au restylage de mai 2009) ; 1.5 dCi 70 ch, 1.5 dCi 85 ch, avec Quickshift, filtre à particules et boite 6 vitesses en option), et 1.5 dCi 105 ch (boite 6 vitesses ; FAP en option).

Le plus gros changement, qui va encore un peu plus doper les ventes, concerne le système de navigation embarqué. En effet, fort d’un partenariat avec TomTom, Renault va mettre à profit une idée ingénieuse et réellement peu coûteuse qui va bouleverser la dotation de série de sa citadine : la navigation GPS à 499 €. Ce tour de passe-passe intéressant arrive au moment où la plupart des constructeurs propose un système de navigation identique à des prix 3 à 5 fois supérieurs à celui de la Clio.
La recette est simple : adapter électroniquement un GPS nomade à la voiture avec une simple coque de protection en plastique et offrir une mise à jour de la cartographie pendant 3 ans. Cet argument de vente va faire l’effet d’une bombe puisque tous les constructeurs concurrents vont finir par tenter de proposer une solution identique à celle de la Clio à plus ou moins long terme. L’essentiel, c’est que la Renault a repris l’avantage…






La Renault Clio III GT, introduite en 2009 lors du restylage.
Côté finitions, on note l’apparition de la Renault Clio GT en 2009 (avec le restylage, donc). Version intermédiaire entre la Clio Dynamique 1.6 16V de 110 ch et la Clio R.S. de 200 ch, la Clio GT s’annonce comme une routière avec des qualités sportives. Bien équipée et dotée d’un kit carrosserie spécifique englobant pare-chocs avant, pare-chocs arrière, becquet, double sortie d’échappement et jantes de 17 pouces, la Clio GT embarque sous le capot un moteur inédit : un 1.6 16V développant 128 ch couplé à une boite manuelle à 6 rapports.
Malgré l’arrivée de la Clio IV en 2012, la Clio III continue sa carrière pendant deux années, sous le nom de « Clio Collection », à l’instar de ce qui avait été fait précédemment, lors du passage de flambeau entre la Clio II et la Clio III en 2005 avec la Clio Campus. La Clio III fut produite à Flins, Bursa, Valladolid et Novo mesto. Avec une carrière de 9 ans, ce sont plus de 2 400 000 exemplaires, toutes versions confondues.
La Clio III : celle qui a définitivement fait de la Clio une référence
Richement équipée, la Renault Clio III a introduit dans le segment la carte de démarrage mains-libres, et fut dotée du GPS ou du régulateur/limiteur de vitesse. Avec jusqu’à 8 airbags, elle permit à Renault d’avoir un line-up complet à 5 étoiles EuroNCap. En compétition, on vit aussi des Clio III en rallye R3.
Au-delà de ses qualités intrinsèques, de sa finition qui fait encore référence, et de son avancée par rapport à la concurrence, c’est l’image mentale que cette Clio a laissé qui est la plus importante : elle fut la référence, et elle a définitivement imposé la Renault Clio comme référence des citadines, un benchmark au même titre que la Golf est la référence des compactes. Un leg qui profite encore aujourd’hui à la Clio IV. Commercialement, le bilan est bon aussi : toujours dans le top 3 français durant sa carrière, et dans le top 10 en Europe, elle n’aura eu qu’un défaut : ne pas assez rapporter d’argent à l’entreprise. Le défi de la rentabilité, c’est la Clio IV qui devra le surmonter. A suivre…
Texte : Stéphane Sorhaindo et François M.
Photos : Pinterest, Auto titre, Netcarshow.com.
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