Le Nouvel Automobiliste
Ford Mondeo II Phase 2 Elance TDCi 115 noir Scala intérieur Biscuit

Sic Transit Gloria Mondeo : 235 000 km en Ford Mondeo !

Nous avons l’habitude de vous offrir des essais complets sur Le Nouvel Automobiliste. Mais peut-on se faire une véritable idée d’un véhicule en quelques jours ? Une fois n’est pas coutume, nous vous invitons à découvrir une voiture au long cours. 15 ans et 235 000 km, en l’occurrence et en Ford Mondeo, une voiture qui s’apprête à tirer sa révérence au sein de notre parc automobile. Sic transit gloria Mondeo : ainsi passe la gloire du monde. En route.

Elle est durablement temporaire

3 ans et 90 000 km. C’est tout ce qu’elle aurait dû accomplir lorsque mon père l’a commandée comme véhicule de fonction. 15 ans plus tard, elle est encore là, développement durable s’il en est, pour votre plus grand bonheur : ça vous vaudra ce -superbe- article.

Retour en arrière, nous sommes à la fin de l’année 2003 et elles sont deux finalistes pour remplacer une jolie Peugeot 406 SV HDi 110 rouge Lucifer à l’harmonie intérieure beige. La 407 tarde à venir, la C5 n’a pas un physique pour elle, mon père se contrefiche d’avoir une étoile au bout du capot : après plusieurs Renault et Ford dans la famille, le choix se porte naturellement sur la Laguna II et la Mondeo II. Renault est le roi de l’entretien à prix canon mais Ford compense par des remises aux loueurs de 15% sur le prix catalogue : le leasing est au même tarif. Un tour chez le concessionnaire achèvera l’arbitrage, les configurateurs ayant déjà arrêté nos choix de versions. Premier arrêt chez Ford : le vendeur est disponible, mon père lui fait comprendre que l’on ne vient pas pour acheter, s’agissant d’un véhicule de fonction. Qu’à cela ne tienne, ledit vendeur fait son boulot, nous présente rapidement les deux Mondeo du showroom, nous tend un catalogue et nous rassure quant à la principale crainte : l’autonomie. Avec un réservoir sensiblement plus petit que sur la 406, mon père redoutait de ne plus battre de record [j’en ai d’ailleurs gardé un goût prononcé pour faire le plein au dernier moment…]. « Vous vous arrêterez avant pour pisser », nous dit le concessionnaire. Imparable.

Seconde mi-temps chez Renault : le showroom est également désert de client mais les vendeurs jouent probablement à cache-cache. Je présente les deux Laguna exposées à mon père jusqu’à ce qu’on se résigne à aller voir une vendeuse probablement assise sur une mine antipersonnel à en juger par son incapacité à bouger. « Les brochures sont là-bas », nous dit-elle en pointant l’étagère. On part avec un catalogue et l’envie d’acheter une Ford. Outre le mauvais accueil chez Renault, la Mondeo sort plusieurs arguments massue pour un papa féru de gadgets : écran tactile, lecteur MP3, cartographie Europe de l’Ouest sur le GPS, elle écrase la Laguna du point de vue infotainment. Ce sera une version haut de gamme Elance avec options GPS et toit ouvrant électrique [mon lobbying avait fonctionné]. Côté mécanique, c’est le TDCi 115 ch qui sera le choix par défaut afin de ne pas dépasser les 7 CV. Les lugubres harmonies sombres exposées chez Ford nous ont naturellement conduit à opter pour l’intérieur Biscuit (comprenez beige) en cuir et Alcantara tandis que le gris Racing se fait doubler par le noir Scala près de la ligne d’arrivée. On sait déjà que l’on va regretter le superbe rouge de la 406 mais le nuancier de la Mondeo est peu affriolant… 32 000 € prix catalogue (soit un peu plus de 38 k€ donnée équivalente en 2019) pour une Mondeo 115 ch, on ne doit pas être nombreux à avoir fait un tel choix. Rendez-vous en février 2004 pour la livraison.

Changement dans la continuité

Le benchmark de Ford pour cette Mondeo était constitué de deux voitures : La VW Passat côté qualité perçue et la Peugeot 406 pour les qualités dynamiques. Autant le dire tout de suite, au volant, on retrouve les sensations de la Peugeot mais on en parlera après. Continuité, donc. On est par ailleurs dans une période où Ford « volkswagenise » ses designs avec notamment la 500 aux USA ou la Mondeo II en Europe : si le point de départ de cette dernière reste le style Edge Design de la Focus, le voici assagi et germanisé. C’est aussi vrai à bord où le style rectiligne n’est cassé que par la casquette du combiné tandis que les grains de plastiques tentent d’imiter par endroit ceux de VW. Mais les harmonies de certains grains ne collent pas avec ceux d’autres zones : le restylage de 2003 corrige cette tare, entre autres progrès. Si la Mondeo II phase 2 ne semble pas transfigurée au premier abord, elle opère une véritable montée en gamme par le biais de chromes, de nouvelles jantes et à bord, par l’apparition de nouvelles commandes sur la console, de nouveaux matériaux et d’équipements inédits.

Sur notre version Elance, cela se traduit par des jantes spécifiques de 17’’ qui avaient beaucoup d’allure, au point de s’attirer la sympathie de nombreux trottoirs (à moins que ça ne soit la faute des conducteurs…), une lame chromée barrant la grille inférieure du pare-chocs, les lécheurs de vitres et poignées de portes chromées, ainsi qu’une paire de monogrammes… Ghia ! Petite erreur sur notre véhicule, curieusement dépourvu des « é » chromés des Elance. Mais sachant que ce niveau de gamme s’appelle également « Ghia-X » ou Ghia Executive » sur les marchés anglais, suisse et allemand, on peut supposer qu’il y a eu un petit bug quelque part et pourquoi pas une erreur de destination. A bord, outre la sellerie cuir/Alcantara (et simili…) susmentionnée, on trouve un volant cuir et bois (noyer californien à en croire les pubs britanniques), tandis que la console et les garnitures de portes avant se voient décorées de faux bois. Sauvez un arbre, utilisez du pétrole ! Autre détail qui tue : si les garnitures de portes avant ont droit à un plastique thermogainé en zone haute et à une baguette en ronce de plastique, les portes arrière, elles, se contentent d’un garnissage noir en injecté (dur) et se passent de la baguette. Il n’y a pas de petites économies. Les Mondeo chinoises étant achetées par des gens ayant des chauffeurs, leurs garnitures arrière étaient plus chics que sur les Mondeo européennes. V’là pour l’instant culture inutile.

D’ailleurs, je crois que papa s’en moque éperdument. Tout ce qu’il sait, c’est qu’il a des projecteurs au xénon, l’allumage automatique des feux et des essuie-glaces, le régulateur de vitesse, les sièges électriques (ni chauffants, ni ventilés, c’est une option qu’on n’a pas prise), la clim auto (même pas bizone, contrairement à la Focus II !), une commande de radio sous le volant façon Renault (mais à gauche) et surtout, le clou du spectacle : un système de la mort qui tue comprenant un écran tactile de 7’’, le GPS (carto sur DVD), le lecteur CD MP3, un chargeur 6 CD (pas MP3…), une prise jack cachée dans la boîte à gants (donc quasi inutile), 8 HP de très bonne facture signés Sony, 9 langues pour le guidage vocal et des changements de voix instantanés, pas comme les GPS PSA des années 2010 qui avaient besoin de rebooter 30 secondes pour ce faire… Bref, le top du top et une option facturée 2 300 €. Soit 500 € de moins que chez Jaguar qui avait inauguré le même écran sur la X-Type auparavant. Le fond d’écran « Jaguar » au démarrage est probablement à ce prix !

Parmi les détails cool, on trouve un push d’ouverture du hayon depuis l’habitacle (ou la télécommande), les vitres et le toit à impulsion avec antipincement dont l’ouverture/fermeture peut se commander à distance, des clignotants à impulsion également, un témoin de liquide lave-glace, un bocal dudit liquide lave-glace de 6 litres qui permet de vider le bidon une bonne fois pour toutes, des crochets d’arrimage dans le coffre (que l’on n’a jamais utilisé, ceci dit), un filet élastique près du chargeur CD et un écran tactile de la mort qui tue (on l’a déjà évoqué ?). Enfin, la superbe horloge de bord vous évite d’avoir à investir dans une Maserati ou dans une Rolex. Dans le registre du moins cool, on a des dossiers de banquette fractionnables… mais une assise monobloc qui n’a aucun sens. On a certes un écran tactile de la mort qui tue (je ne vous apprends rien) mais l’ordinateur de bord est matérialisé par un pauvre écran à cristaux liquides digne d’une montre Casio de 1983. Et il est incapable d’afficher la consommation instantanée ou les révisions à venir. La perfection n’est pas de ce monde, il faut croire. Mais la Mondeo a d’autres atouts…

Elle a un pare-brise dégivrant

Oui, en bonne Ford, elle a un pare-brise dégivrant (dont le pictogramme évoque plutôt un oscilloscope…), de série sur cette version. Et aussi étonnant que cela puisse paraître, cet équipement n’est toujours pas un standard sur le marché. Franchement, ne me dîtes pas que vous arrivez à gratter le pare-brise de votre monospace ou de votre SUV sans prendre un escabeau. Et n’allez pas me faire croire que je suis le seul à mesurer moins de 1,70 m ici… Et pourtant, hormis Ford et les marques qui ont gravité autour (Jaguar, Land Rover et Volvo), presque personne n’a recours à un système comparable. Ça fait plus de 30 ans que les autres constructeurs n’ont rien compris… et d’ailleurs, mon père ne comprend pas non plus que les autres n’aient rien compris. Les vrais savent ce qui est bon.

Elle a un toit ouvrant

Les vrais savent. Luminosité, flux d’air, les joies des balades calvitie naissante au vent, c’est quand même bien plus agréable que les vitres latérales et ça évite un trop grand recours à la clim. Désormais, vous savez.

Et la présence du toit ouvrant permet aussi de relever le niveau de la zone haute de l’habitacle : en effet, avec sa garniture de pavillon digne d’une Fiat Panda et ses garnissages de montant B issus de lavabos de toilettes publiques (un Granatex de chez Gruber a plus de classe, ceci dit…), la présence du toit ouvrant vitré donne un peu de cachet à un ensemble indigne du segment D. Vous noterez par ailleurs que malgré l’harmonie beige, la garniture de pavillon reste grise, économies obligent. Les 406, 407, Passat, S60, 75, X-Type et les premiums allemands faisaient mieux. Ford avait au moins le bon goût de proposer l’ouverture/fermeture à distance des 4 vitres et du toit par le biais de la télécommande. Une excellente manière de rafraîchir l’habitacle avant de monter dans une voiture parquée en plein zénith.

Elle est personnalisable

Oui, vous pouvez commencer par l’essentiel pour la personnaliser : y glisser des albums de Michael Jackson afin d’écouter la parole de Dieu tout en roulant. L’excellente installation audio Sony 8 HP restitue d’ailleurs très bien la liturgie du Roi de la Pop. Owwww ! Les voyages en famille vers les Pays-Bas trouvaient alors un relief que le paysage n’offrait pas. D’ailleurs, sur les 7 CD que contient le système audio de la voiture, il y en a toujours eu au moins un durant ces 15 années qui était signé par Dieu. Mon père a bon goût, il a toujours su s’entourer pour voyager. Et puisqu’on parle musique, la Mondeo, à l’image de la mythique Mustang, est citée dans une chanson rock. Certes, c’est un fort bon titre des excellents Arctic Monkeys mais ça sert à décrire le véhicule d’un client des professionnelles dans « When The Sun Goes Down » … On aurait pu rêver plus valorisant, mais avouez qu’aucun groupe de rock ne cite la Laguna ou la Vectra. C’est ça aussi le prestige.