Le Nouvel Automobiliste
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Les minispaces ou les portes de la perception

Les années 80 ont vu la naissance des monospaces, les années 90 ont vu leur succès et l’avènement de leurs petits frères, les monospaces compacts, portés par l’insolent lancement de la Mégane Scénic. Alors la recette est de nouveau déclinée dans les années 2000 : au tour du segment B de voir ses monocorps se développer : Renault Modus, Peugeot 1007, Citroën C3 Picasso chez les français, mais aussi Audi A2, Fiat Idea, Lancia Musa, Mercedes Classe A, Opel Meriva, Nissan Note, Toyota Verso S chez les étrangers. Dernier arrivé sur le segment des minispaces, Ford avec son B-Max produit à Craiova. Alors que ce dernier vient de tirer sa révérence, les autres ont disparu ou ont été remplacés par des SUV. En dehors de la Fiat 500L, plus aucune nouveauté à signaler. Alors, inintéressants les minispaces ? Pas si vite : curieusement, ce segment de marché a été marqué par une volonté spontanée d’offrir des ouvrants originaux. Tour d’horizon.

Pas ayatollah de la voiture statutaire pour un sou, je dois admettre que les monospaces m’ont toujours fasciné. Ca remonte à ma première rencontre avec un Espace à la fin des années 80 : encore rare sur nos routes, je faisais face à une voiture inconnue sur le chemin de l’école maternelle. Ma mère me donne le nom de la voiture puis me porte pour que je voie l’habitacle. Une voiture à vivre. Avec des jouets à l’arrière. L’image m’est restée.

L’Espace m’a toujours attiré depuis, comme tout le segment des monospaces, par la force des choses, en particulier le descendant actuel de l’Espace Matra : le Citroën C4 Picasso qui s’en approche le plus dans la philosophie. Les autres se prennent souvent pour des berlines qu’ils ne sont pas. Alors je ne cache pas que je fais partie de ces rares aliénés qui apprécient les Renault Modus (les premières à clignotants oranges, hein, pas les autres mal assumées par la suite…), Peugeot 1007 et autres Lancia Musa. Sans parler de la C3 Picasso que je trouve réussie, en particulier dans sa teinte de lancement : Bitter Lemon. Apparemment, le public ne le voyait pas du même œil, les ventes de ce segment n’ayant jamais été époustouflantes. Les minispaces, une décennie de voitures qui finiront par être oubliées ? Avant de refermer la page, ouvrons d’abord leurs portes !

Portes coulissantes :

Avec l’avènement du 806, Peugeot fait le choix de la porte coulissante pour son grand monospace : comme les américains ou les japonais, à ceci près que le quatuor franco-italien offrait deux portes coulissantes. Le 807 qui a succédé à son prédécesseur (logique) a innové avec la motorisation des portes coulissantes. A cette époque chez Peugeot, on y croit, en particulier après que Renault leur ait donné une leçon de portes coulissantes au lancement du Kangoo : les portes coulissantes font vendre. Le concept car Prométhée qui préfigure la 307 présente 4 portes coulissantes, un projet avorté de monospace compact à portes arrière coulissantes, code A48, a même été étudié. En 2002, c’est le concept Sésame qui annonce la future 1007 de 2004 : l’innovation est incarnée par deux portes latérales coulissantes électriquement.

La voiture est sans rivale ou presque : au Japon, Toyota a lancé quasi simultanément la Porte, qui portait bien son nom : une porte conducteur coulissante et deux portes passager battantes. Deux concepts innovants, permettant un accès facile au véhicule en milieu urbain, la Peugeot 1007 offrait même l’ouverture à distance des portes. Pour cette dernière, le poids de la voiture et sa gamme de GMP ont été fatals tandis que le look a été diversement apprécié. Dommage : la voiture s’éteint en 2009, abandonnée par Peugeot tandis que la Toyota Porte vivote paisiblement quelques années de plus, grâce à une seconde génération. Et aujourd’hui pour le Lion ? Le succès de Peugeot sur le segment s’appelle 2008 et est un SUV. Classiquement.

Portillon dans le volet de coffre :

Renault Modus

Alors que Peugeot présente sa 1007, Renault lance la Modus, qui voudrait être à la Clio ce que le Scénic est à la Mégane. « Grandir ? Pour quoi faire ? », nous dit le slogan ? La voiture est ludique, souriante, colorée mais semble-t-il mal dimensionnée : pas assez grande, mon fils. Un coffre trop petit pour la clientèle, et des motorisations à la peine face au poids d’une bête qui atteint les 5 étoiles Euro NCAP, comme la 1007, au prix d’un certain embonpoint (à vous de prévoir les passages à la pompe qui vont avec). La clientèle reste fidèle à la Clio II pourtant moins agréable.

Et on oublierait presque que la Modus a innové avec plusieurs astuces, comme le porte vélos intégré, largement vendu chez Opel, depuis, ou le pack Compacité qui intégrait un hayon à double ouverture : vers le bas façon Austin Mini, ou classiquement, comme sur une voiture traditionnelle. Pratique mais pas indispensable. Renault l’a supprimé au restylage, en même temps que tout ce qui rendait la Modus sympathique a disparu (baguettes avec motif en forme de vagues, ambiances intérieures colorées, tissus chatoyants, version Initiale, xénons, couleurs de caisse…). Ce hayon n’a jamais été reconduit sur un autre produit et le succès du Captur prouve que faire un joli SUV, fut-il moins pratique, paie. Et bien.

Portes arrière antagonistes :

Ils n’ont plus de Rolls Royce ? Donnez-leur des Meriva ! Eh oui, la prestigieuse firme britannique n’a pas fini d’inspirer les marques populaires : alors que Skoda met des parapluies dans les portes de ses grandes voitures, Opel a repris à son compte l’idée d’avoir des portes antagonistes à l’arrière. Pas pour le prestige, mais pour faciliter l’accès et l’installation de sièges pour enfants. En plus de la modularité de son prédécesseur, l’Opel Meriva II s’offrait un argument commercial de plus. Mais il n’a pas particulièrement fait mouche : la voiture ne s’est pas mieux vendue pour autant, la faute à un segment de marché déclinant. Alors déclinons : la remplaçante du Meriva est devenue un SUV… pour changer. Bienvenue au monde Opel Crossland X. Et avec plusieurs handicaps à la naissance : un nom stupide et une cousine de chez Citroën bien plus jolie (C3 Aircross). Le Meriva avait au moins le mérite d’être joli. A défaut d’être un SUV.

Portes coulissantes arrière et portes avant embarquant le montant B :

Ford B-Max

Mot compte double : le Ford B-Max pousse le concept des « portes pas comme les autres » à son paroxysme. Pour tout vous dire, quand le concept préfigurant le B-Max a été révélé, je n’y ai pas cru pour la version de série, notre bon rédac’chef en est témoin. Et pourtant, Ford l’a fait, sur une voiture populaire, qui plus est ! Formule tout droit héritée du premier Nissan Prairie mais avec les contraintes actuelles en termes de sécurité passive : belle performance, au prix de lourdes portes avant, puisqu’elles embarquent le pilier central. Au prix également d’un coffre un peu réduit à cause des rails de portes coulissantes, prenant de la place en largeur. Est-ce la cause du manque de succès ? Non : lancé trop tard alors que les SUV du segment B prenaient leur envol, le Ford B-Max ne pouvait plus séduire, la mode avait tourné. Pour le remplacer ? Un SUV, bien entendu : l’Ecosport modernisé prend sa place dès cet été sur les chaines roumaines de Craiova… et il garde sa stupide porte arrière en guise de hayon, comme sur la version non restylée.

Au revoir ou presque les minispaces, certes, mais on n’allait pas se quitter sans ouvrir une dernière fois leurs originales portes : Toyota Porte, la bien nommée, Peugeot 1007, Renault Modus, Opel Meriva et Ford B-Max, ces 5 voitures auront essayé d’imposer d’originaux ouvrants sur le marché. Mais celui-ci est darwinien : l’espèce la plus solide est le SUV, c’est celui qui survivra à ces accès d’originalité. Quant à mon penchant pour les monospaces, je vous prie, ça reste entre nous, OK ?

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