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Essai McLaren GT Kyanos Blue

Essai McLaren GT : l’art du voyage

Certains cherchent le dépaysement en visant une destination sur le GPS et en y emmenant les enfants qui s’impatientent sur la banquette arrière du monospace SUV familial. Pour d’autres, qu’importe la destination, c’est le voyage qui compte. C’est pour ceux-là que les britanniques ont confectionné la McLaren GT. Sur la route de Paris à Cherbourg, et à travers les lacets du bocage normand, voyons comment le constructeur de Woking souhaite réinventer le Grand Tourisme.

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McLaren GT : réinventer le voyage rapide

Voiture sportive performante ou voiture avec un espace de chargement suffisant pour voyager, pourquoi choisir ? C’est ce qu’affirme McLaren avec sa GT. Néanmoins, il faut tout de même bien choisir son passager, puisqu’il n’y a qu’une seule place en plus du conducteur.

Mais bonne nouvelle, McLaren annonce tout de même près de 570 litres de volume de coffre – soit autant qu’un Mercedes-Benz GLB. Pour y parvenir, il faut composer avec un coffre avant de 150 litres et 419 litres d’espace sous le long hayon arrière vitré.

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N’en n’attendez néanmoins pas pour autant une praticité exemplaire. En effet, le volume à l’arrière s’étend tout en longueur et prend place juste au-dessus du moteur central arrière. On ne va rien vous apprendre, mais un V8 4.0 litres biturbo monopolise beaucoup de volume et la hauteur de stockage est donc limitée. C’est d’ailleurs le même moteur M840TE que l’on retrouve dans la McLaren Senna ou la 720s, mais qui est ici rabaissé à 620 chevaux et 630 Nm de couple pour gagner en souplesse et en confort.

Quoi qu’il en soit, selon McLaren, l’espace entre ce moteur et le hayon électrique permettrait d’embarquer un set de clubs de golf ou deux paires de skis. Conclusion : voyagez léger avec le petit coffre avant, mais partez tout de même avec des skis à l’arrière.

Pour l’occasion, McLaren a dû modifier la cellule en fibre de carbone qui accueille ses occupants afin d’ajouter un plancher sous le hayon arrière. Cette “MonoCell II-T” intègre donc donc maintenant une structure spécifique en fibre de carbone. Avec un moteur qui peut atteindre plus de 500°C, ce nouveau plancher a aussi la lourde charge d’isoler le coffre arrière qui ne doit pas atteindre plus de 40°C. Pour y parvenir, le refroidissement est primordial. D’imposantes écopes latérales viennent alors apporter un flux d’air nécessaire.

Moteur central arrière, immense hayon vitré, généreuses prises d’air latérales : les bases du design de la McLaren GT sont posées. Le reste à l’avant n’est qu’élégance et fluidité avec des courbes douces et raffinées. La face arrière, quant à elle, laisse présager des performances de conduite. On retrouve notamment deux pots d’échappement béants. Ils entourent une grille qui laisse entrevoir quelques entrailles de la bête et surplombent un immense diffuseur. C’est un appel à la conduite, rien de plus.

McLaren GT : un écrin de conduite possible ?

6h du matin. Il est l’heure d’ouvrir la large portière en élytre qui s’élève pour enjamber la structure cellulaire et se glisser dans les sièges en cuir, chauffants et électriques. Pas de doute, nous sommes bien à bord d’une “routière”. McLaren cherche à nous propulser dans un cocon bien plus précieux que dans tous ses autres modèles. Ici, pas d’alcantara ou de carbone, tout est garni d’un cuir tendre et épais. Tout sauf les montants du pare-brise en plastique dur et quelques commandes qui peuvent paraître datées. Certaines finitions et pliures laissent aussi parfois un cachet artisanal. Dommage, mais l’esprit global reste raffiné.

Une pression sur le bouton de démarrage, et le moteur gronde contre les parois étroites du garage. Désolé chers voisins, vous qui habitez juste au-dessus, mais voyez le bon côté des choses, le V8 de la McLaren GT et ses bruits d’échappement sont probablement les plus discrets de la gamme (peut-être même un peu trop ?).

S’extirper ensuite de Paris, avec son asphalte irrégulier, souvent abîmé et jonché de portions pavées, met directement à rude épreuve les suspensions hydrauliques pilotées électroniquement. En mode “confort”, il faut noter un impressionnant travail de filtration des aspérités de la route. Certes, on ne profite pas non plus de la douceur d’une Rolls Royce au vu du caractères sportif de la voiture, mais c’est tout de même très étonnamment confortable pour une sportive de ce niveau.

Comme toujours chez McLaren, c’est avec des molettes au niveau de la console centrale que l’on peut modifier le comportement de la boîte de vitesses et du moteur. Ces deux niveaux de réglages permettent une personnalisation précise de la conduite, en trouvant un juste équilibre entre ces deux éléments mécaniques et les conditions de roulage. Pour s’en convaincre, rien de mieux qu’un roadtrip en direction de la féérique Route des Caps.

McLaren GT : faite pour la route ?

Avant d’atteindre la Normandie, quelques centaines de kilomètres sur autoroute permettent de constater que c’est ici que la McLaren GT consomme le moins de carburant. Si on oscille entre 20 et 30 litres aux 100 km en zone urbaine en fonction de la densité du trafic, la consommation devient nettement plus raisonnable à 130 km/h et tombe à 10 litres aux 100 km.
C’est également sur voie rapide que l’on constate malheureusement des bruits d’air très désagréables. Il faut dire que le dessin extérieur et les larges parties vitrées ne cachent pas les efforts aérodynamiques du véhicule provoquant des bruits incommodants. Pas de chance, on ne peut pas non plus se rabattre sur le système audio irritant pas particulièrement séduisant : les basses sont bien trop accentuées, les différentes tonalités ne se distinguent pas suffisamment et la spatialisation du son est très moyenne.

Qu’à cela ne tienne, le train avant léger et le bon équilibre global de la McLaren GT n’attendent que les virages des routes départementales du Cotentin qui ne sont maintenant plus qu’à quelques encablures. Et elles laisseront également de côté le bourdonnement du moteur qui dégage un son étouffé lorsqu’on est en sous-régime à cause de la boîte de vitesses qui a tendance à passer un ou plusieurs rapports en trop en mode automatique.

McLaren GT : l’expérience du Grand Tourisme

Le soleil commence à surgir de l’horizon, et les dunes de Biville nous accueillent dans un décor enchanteur. C’est donc ça le Grand Tourisme : rouler et s’émerveiller, simplement rouler pour le plaisir de voyager et découvrir des environnements sublimes.
C’est le début d’un périple et surtout à partir de maintenant que la McLaren GT est vraiment dans son élément. Prête à avaler du bitume et à enchaîner les virages le long du littoral normand, confortablement installé dans une voiture chargée de bagages et pourtant admirablement rapide.

C’est le moment de profiter de routes fabuleuses dans un environnement éblouissant. C’est donc également l’occasion de tirer parti du potentiel de la GT en passant le moteur en mode sport et la boîte en mode manuel. Première. Deuxième. Troisième. Le 0 à 100 km/h est abattu en 3,1 secondes et, très vite, on plonge dans un court virage à gauche débouchant sur les falaises du Nez de Jobourg. On hésite presque entre hausser le rythme et rétrograder pour s’arrêter et profiter du paysage. En réalité, on fait les deux. L’utilisation des palettes au volant est un régal extraordinaire. Elles sont larges et tombent toujours sous les doigts. En plus, elles permettent de changer n’importe quelle vitesse avec une facilité déconcertante puisque les palettes sont solidaires l’une de l’autre et chacune permet, en la poussant ou la tirant, de monter ou descendre un rapport.

Le train avant est acéré et on se sent rapidement en sécurité grâce au positionnement central du moteur qui offre un très bon équilibre en courbes. L’efficacité McLaren est bien là : avec un moteur avant ou arrière, ce ne serait clairement pas la même chanson. Le V8 est loin de s’essouffler sur ces routes scéniques. A partir de 3000 tours par minute, les turbocompresseurs montent au créneau. A partir de 5500 tours par minute, c’est l’explosion de performances et de sensations. Le train arrière est rivé au sol avec une électronique à la permissivité bien calibrée, la voiture avale les virages avec facilité et en redemande toujours plus.

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A l’approche du Cap de la Hague, les freins surprennent toujours autant. La McLaren GT est ici équipée de freins en céramique particulièrement redoutables d’efficacité en conduite (très) sportive. Un vrai système de freinage de compétition. C’est déroutant pour une voiture qui se veut plus GT que voiture de piste, mais c’est surtout surprenant à basse vitesse où l’on manque de dosage et d’efficacité.

Finalement, la McLaren GT est stupéfiante et nous fait presque oublier tous nos repères automobile. Elle consomme moins de carburant quand elle va vite, elle devient vraiment à l’aise quand elle va vite, elle fait preuve d’encore plus d’adhérence quand elle va vite et elle montre un freinage mordant uniquement quand elle va vite. C’est parfois contre-intuitif mais l’essentiel est là : l’efficacité en conduite sportive.

McLaren GT : par amour du déraisonnable

Les kilomètres défilent au compteur et on remonte une côte sauvage jusqu’à Cherbourg pour faire le plein de carburant. Une fois arrivé dans un espace plus densément peuplé, le regard des piétons et usagers de la route redevient omniprésent. Il y a les passionnés qui sortent leur smartphone, les curieux avec des étoiles dans les yeux ou les frustrés qui rejettent l’automobile chatoyante. Il faut reconnaître que le dessin galbé de la voiture, sa rare couleur ”Kyanos Blue », ses portes en élytre ou le bruit de son moteur ne permettent pas de passer inaperçu et obligent à devoir assumer ce regard social.

Pourtant tout n’est pas somptueux et dispendieux, comme par exemple le système d’infotainement qui semble d’une autre époque. Mais au volant, ça ne compte presque plus. A bord d’un tel écrin, avec de telles sensations au volant, on ne cherche même pas à regarder l’écran tactile de 7 pouces. Les yeux sont rivés sur la route et les paysages qui défilent. Les quelques boutons essentiels à la conduite tombent sous la main et on s’y retrouve très vite sans chercher à l’écran des options cachées dans d’innombrables sous-menus.

Près de 1000 km de plaisir au volant plus tard, on relève une consommation moyenne de 15,7 litres aux 100 km. Honnête au vu des performances. Mais on voit mal comment les prochaines générations ne pourront pas s’électrifier pour être commercialisables en Europe. La McLaren Artura ouvre déjà la marche dans ce sens.
A partir de 199 500 euros, notre modèle d’essai atteint plus de 240 000 euros avec ses options. Si on en doutait encore, c’est une voiture déraisonnable. Mais la McLaren GT fait partie de ces rares voitures pour lesquelles on tombe amoureux. Rationnellement, la concurrence a peut-être des arguments solides que n’a pas la GT pour une utilisation quasiment quotidienne. Porsche, Ferrari ou Aston-Martin ont parfois plus d’équipements de sécurité ou de confort, ou un infotainment plus abouti, voire un design plus discret. Mais au final, quelle que soit la vitesse de conduite, aucun ne procure les sensations de cette GT et McLaren réussit à rajouter un supplément d’âme qui lui fait tout son charme. Quand est-ce qu’on repart en roadtrip ?

Photos McLaren GT

Crédit photos : Romuald Terranova – Le Nouvel Automobiliste (Fabien Legrand pour les images place Vendôme à Paris)

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